Quelques prolégomènes à l'étude normative dans l'oeuvre de Marie de France
Marie de France et son temps de E. A. Francis
Conclicting Codes of Conduct : Equity in Marie de France's Equitan de Gloria Gilmore
NOTES
MARIE DE FRANCE ET SON TEMPS
* Cet article a été initialement publié dans la revue Romania t. 72, n°285 (1951), p. 79-99.
(1) Lais, (éd.) A. Ewert, Basil Blackwell, Oxford, 1944, p.VII, L-F-E (Warnke), L-E-F (Levi, Nagel, G. Paris), B-T-L (Mali, Jenkins, G. Cohen, Hoepffner).
(2) Une indication isolée, quant à la date, se trouve dans l'Espurgatoire, une traduction du Tractatus de H. de Saltrey, qui ne peut avoir été composé avant 1185 et dont l'interprétation de Marie n'est vraisemblablement pas antérieure à 1189 si l'on tient compte de l'année de canonisation officielle d'un saint (dont le nom est donné dans son œuvre). Pour la critique, voir Lais, éd. cit., A. Ewert et en particulier E. Nagel, E. Levi, J. Harris, L. Foulet, L. Spitzer. Les suggestions contradictoires quant à l'identification de l'auteur sont : Mary, abbesse de Shaftesbury, demi-sœur de Henri II, ou une abbesse de Reading, ou encore la fille de Waleran, comte de Meulan.
(3) Auguste Longnon, La formation de l'unité française, A. & J. Picard, Paris, 1922. Le Vexin français fut laissé à la garde des Templiers pendant l'intervalle entre les fiançailles (à l'âge de six mois) de Marguerite, fille du roi de France, et son mariage (à l'âge de deux ans) avec Henri, fils d'Henri II, c'est-à-dire de 1158 à 1160. En ce qui concerne la preuve d'une charte au Prieuré, accordée en 1177 par Louis VII, voir l'article de G. Cohen, Mercure de France, CCLXV, p. 61.
(4) Voir Fables, (éd.) A. Ewert et R. C. Johnston, Basil Blackwell, Oxford, 1966, "Introduction", p. 1, note 4.
(5) Hervieux, I, p. 549 et Ewert, op. cit., p.XII.
(6) "Seigneurs, bourgeois, vilains, sorciers, mauvais juges, usuriers, défilent successivement devant nous, et chacun y reçoit sa leçon. Les temps sont durs, l'injustice et le mal triomphent partout ; mais, comme l'enseigne l'histoire des lièvres et des grenouilles, où trouver une terre où l'on puisse vivre "sanz poour, ou sanz traveil ou sans dolour" ? Le triste sort des humbles arrache à Marie des larmes, mais point de cris de haine. Si elle recommande aux grands "droiture et la modération, elle ne cesse de conseiller aux petits l'obéissance et l'aversion de la félonie". (L. Sudre.) Cette appréciation est citée comme exemple de l'interprétation habituelle des Fables. Leur application me paraît moins large et concerne les classes de barons et chevaliers. Pour les références supplémentaires, voir Appendice. Il est à noter que les morales contiennent souvent des idées qui ne se rattachent pas très bien aux anecdotes.
(7) Fables (éd. Warnke, 1898), XVIII, XX, XIX, XI, XXXVIII, XXIX, XLVI, LXXVIII, XLIV, XXXIX, LXII, LVL, XLII, II. Cf. Powicke, Loss of Normandy, Manchester, 1913) p. 89 sur les réformes de Fitz Ralf et la remarque de Norman d'Orgierville disant qu'il avait vécu assez longtemps pour voir jouer "Silly Bernard" à la cour du seigneur roi.
(8) C. H. Haskins, Henry II as a Patron of Literature, Manchester,1925.
(9) E. A. Francis, The Trial Scene in Lanval, Manchester, 1939.
(10) Lais, (éd. Ewert) Oxford, 1944, (Introduction, p. IX ; Levi, G. Paris, S. Painter)
(11) S. Painter, "To whom were the Fables dedicated ?", Speculum, 1942.
(12) Powicke, Loss of Normandy, op. cit., p. 63 ; Stenton, English Feudalism,Oxford, 1932 - "A new class of officials a rose [...] and the line of between the servants of the household and the local officials became faint [...] the viscounts worked side by side with the servants [...] and justices : the word ballia, a vague general word, was employed for offices and jurisdictions of every kind." Powicke, Loss of Normandy, op. cit., p. 67.
(13) Fables, (éd. Warnke) XLIV, LI, LXXVII (Lanval), XXXIV (Eliduc), XXI, LXXIV (Fresne), XXXIII, XLII, XLV (Bisclavret).
(14) Hoepffner, Les Lais de Marie de France, Paris, 1935, p. 83.
(15) En ce qui concerne la bibliographie, voir Ewert, Lais, p. XIV-XVI.
(16) J. Bédier, Marie de France (Histoire de la Nation Française).
(17) Lais, (éd. Ewert), p. 173, n. 19. La forme du nom de Lanval n'a pas été expliquée de façon satisfaisante (cf. Hertz, p. 370-371), op. cit., p. 185. Eliduc et Guildeluec sont très probablement d'origine celtique et Guilliadon d'origine germanique. Pour une étude complète, voir E. Brugger, "Eigennamen in den Lais der Marie de France", Z. f. fr. Sp. u. Lit., XLIX, 1927.
(18) M. Hoepffner, d'accord avec cette théorie, pense que Marie a été inspirée par l'épisode de Gormunt et Isembart et relève la similitude dans les détails du récit.
(19) Th. Chotzen, Bisclavret, Etudes celtiques., XXXIV, p. 42. Comme alternative il suggère Miles de Clare.
(20) Les membres de cette famille sont associés, au point de vue possession de terres, avec les Beauchamp et avec Hamo de Saint-Clair. Les domaines se trouvaient dans le Lincolnshire, le Kent, l'Essex et les comtés environnants des Midlands. Ces terres, possessions du "Dapifer" (Eudo) d'Edouard le Confesseur, avaient été apportées en mariage par l'héritière d'Hubert de Saint-Clair et, avec d'autres fiefs, furent "erected into an honor known as the barony of Lanvalei after they had descended to William de Lanvalei (I)" (Farrer, Honors and Knights' Fees, Manchester, 1923, etc.). Pour les autres mentions de la famille, voir Pipe Rolls (Henry II, Richard and John), The Red Book of the Exchequer, Round, Catalogue (Rolls Series).
(21) Sur "Willelmus de Lanvalei" (Lanvallay, anvallein) voir Eyton, Court, Household and Itinerary of Henry II, Londres, 1878 ; L. Delisle, Recueil des Actes de Henry II (Introduction). Les notes de Delisle mentionnent un Robert et un William, tous deux sénéchaux de Rennes dans le cartulaire de Savigny. Les fils d'Henri II n'avaient pas droit à des officiers personnels, mais étaient obligés d'accepter ceux assignés (et employés) par Henri. De nombreuses mentions sont faites dans les Pipe Rolls, V. CH. (Berkshire, Bedfordshire, etc.), dans Judges de Foss et Observations de Stapledon. Le Pipe Roll (1130) fait mention d'un Herv'Lanval.
(22) Brugger, "Eigennamen in den Lais der Marie de France", art. cit., p. 251.
(23) La première mention se trouve au sujet d'une fondation cistercienne, par un Alain "Dominus de Lanvaux" en 1138. La fin de la baronnie survint lorsque Jean le Roux, duc de Bretagne, emprisonna le "Dominus de Lanvaux" pour la vie et annexa ses terres, vers la fin du XIIIe siècle : ceci fut confirmé par le Parlement de Vannes (1451) : "parla ledit Chancelier touchant les Baronies d'Avangour, de Lanvaux et de Fougères, disant que celles d'Avagour et de Lanvaux estoient de longtemps [...] adjoints au corps du Duché de Bretagne". Il est fait mention, au XIIIe siècle, de "milites", Alanus, Bastardus Oliverius de Lanvaos, et Gaufridus.
(24) Les rôles d'hommages et de service militaires dus au Mont-Saint-Michel (1154) font mention de Radulphus de Lanvalay (cf. V. C. H. Berk., pour terres en la possession de Ralph de Lanvalei en 1164, 1173 et 1194) : le Cartulaire de Vieuxville (XIIe siècle) mentionne un don de Johannes de Lanvalai hoc ipsum juravit Hamo cognatus ejus, Apollonius sororius ejus et Willielmus filius Alani avunculus ejus. G. de Lanvalai est témoin d'un accord pour le Prieur de "St. Florent sous Dol" ; trois actes du XIIe siècle sont faits en la présence de Guillelmus de Lanvallei, senescallus Redoniae.
(25) F. M. Stenton, English Feudalism. op. cit., p. 32 ; voir aussi une note montrant que trop peu d'attention est généralement accordée à cet aspect de la Curia Regis.
(26) Exemple, pris au hasard, de juxtaposition contemporaine : le "Hampshire Pipe Roll" fait paiement, sur autorité de Richard Lucy, à un groupe de Juifs envoyés par ordre du roi à Carlisle et à William de Lanvalei, pour réparation de la porte du château de Winchester.
(27) Dictionary of National Biography. Round (Feudal England, p. 313) donne des détails sur la famille et les frères Roger et Durand de Pistres. Walter Fitz Roger (ou de Gloucester), fils de Roger, eut pour successeur son fils et héritier Miles, et le fils de ce dernier, Roger, lui succéda (1143). Round suggère qu'un Roger de Pistres (charte de 1107) devrait être identifié avec le fils de Durand, Roger (de Gloucester). Je crois qu'il n'est pas exagéré de supposer que le procédé d'avancement des petits chevaliers et barons - grâce au développement des charges royales et l'acquisition de terres, surtout par mariage - tendrait à obscurcir ou cacher les noms territoriaux précédents. Miles de Gloucester devient Comte de Hereford, "Gloucester" n'étant pas disponible. (Voir G. de Mandeville, de Round.) Le château de Gloucester avait été confié à Roger de Pistres par Guillaume le Conquérant.
(28) Un récit dans lequel l'auditoire reconnaît des caractères topographiques, généalogiques et même hagiographiques qui lui sont à un certain degré familiers, ne pourrait manquer d'éveiller un grand intérêt. La légende de la tombe des deux amants présente une variété d'aspects intéressants qui ne sont pas sans quelques rapports avec, par exemple, ceux qui s'appliquent, plus tard, à la tombe de "fair Rosamund", à Godestow. Cf. Ewert, Lais, éd. cit., p. 177: "Pistreis would seem (at least in the mind of the scribe of H) to denote the region".
(29) "Pur ceo que al freisne fu trovee, Le Freisne li mistrent a nun, e Le Freisne l'apelet hum."
(30) "Sire, funt il, ci près de nus Ad un produm, per est a vus ; une fille ad, que est suen heir : Mut poez tere od li aveir. La Codre ad nun la damesele ; En tut cest pais ne ad si bêle. Pur le Freisne, que vus larrez, En eschange le Codre avrez. En la Codre ad noiz e deduiz ; Freisne ne porte unke fruiz."
(31) "Fresnay-le-Vicomte faisait partie de la vicomté de Beaumont." Auguste Longnon, La formation de l'unité française,op. cit., p. 252. Beaumont, sur la Sarthe, dépendait du comté d'Anjou. Pour Fresne-l'Archevêque (Andeli), voir Powicke, Loss of Normandy, op. cit.,. p. 173, note. L'endroit n'est pas loin de Pitre. La Fresnais, près de Dinan, est aussi à mentionner.
(32) Voir Red Bcok of the Exchequer, " Hereford in Wallia", Walter, Ralph, Thomas et Alfred. Filius Simonis filii Petri, qui habet filiam Rogeri de Fraisneto est mentionné dans le Somerset, Hugh dans le Kent (de Fresneis) et Henri dans le Buckinghamshire. D'autres familles qui peuvent être citées sont celles de deux chevaliers, William et Conan, à qui Henri Ier donna des terres dans le Sussex. Alan, fils de Conan, possédait cette terre en 1166, et en 1186 elle était passée aux Fitz Alan de Clun (Salop). En France, Nicolas de Fresneie est mentionné au sujet d'un don (d'un palefroi et de peaux de chats), d'Alan de Saint-Michel à Saint-Florent-sous-Dol. Le nom est mentionné au XIIIe siècle (William, Payn et Peter). Un document de 1269 porte quatre sceaux et l'un d'eux montre "un fresne arraché et est de Geoffroi le Fresne". Simund de Freine, chanoine de Hereford, composa ses deux traductions en français, en vers : Roman de Philosophie et une Vie de Saint Georges, vers la fin du XIIe siècle. Comme Marie, il eut soin de marquer qu'il en était l'auteur, un acrostiche se trouvant dans chaque ouvrage
(33) Des terres furent octroyées à Roland de Dinant (probablement un descendant des seigneurs de Dinan), dans le Sussex, par Henri II. Roland mourut en 1182 et son neveu Alan lui succéda. Alan de Dinant est mentionné à Southampton en 1158-1159. Roland avait aussi été enregistré dans le Northamptonshire, en 1166, parmi les "nouveaux" fiefs de Robert Foliot. Joce et Olivier de Dinant sont mentionnés, Joce dans le Berkshire. Sybil de Plugney et Hawise de Dinant sont les filles de Joce de Dinant (1199). Radulphus de Plugneio apparaît fréquemment dans les "Pipe Rolls" avec des membres de la famille de Lanvallei et dans des transactions dans les Midlands.
(34) Red Book of the Exchequer, XLVI. II y a lieu de remarquer le rôle dans la carrière du Justicier de ses quatre mariages : d'abord avec l'héritière du comte de Devon, ensuite avec la veuve du comte de Mandeville, avec l'héritière du comte de Gloucester (la femme répudiée du roi Jean d'Angleterre) et enfin avec la sœur du roi d'Ecosse, le jour même des noces de ce dernier avec la sœur du roi Henri III d'Angleterre.
(35) F. M. Stenton, English Feudalism, op. cit., p. 25.